"Le Mans, le 25 septembre 1835.
Monsieur le Procureur Général,
Peu satisfaits de la chambre des Députés, les journaux de l'opposition ont excité les conseils généraux à se prononcer contre les dernières mesures du gouvernement. Par suite de ce mot d'ordre, M. de St-Albin a proposé hier au Conseil Général de la Sarthe de demander le rapport des lois du 9 de ce mois. La composition du conseil général faisait craindre vivement que cette proposition ne fût accueillie : elle a été rejetée aujourd'hui par 19 membres sur 27. M. de St-Albin s'est montré si violent qu'il a été abandonné par plusieurs collègues qui devaient le soutenir.
Si le conseil général avait émis le voeu qu'on lui demandait, les lois nouvelles auraient reçu, dans ce pays, une grave atteinte morale, atteinte d'autant plus dangereuse que le jury y juge souvent les délits de la presse.
Je m'abstiens de donner avis à M. le Garde des Sceaux de cet important résultat que vous voudrez sans doute lui annoncer vous-même.
On pense qu'avant la fin de la session, le conseil général sera encore pressé de faire quelqu'autre représentation hostile au Gouvernement.
C'est hier que le sort du Courrier de la Sarthe a été décidé dans une réunion générale des actionnaires. On m'assure que ce journal va tomber : on ne dit ps dans quel délai. Je tiens ce renseignement de si bonne source que je ne puis croire qu'on m'ait induit e n erreur.
Le Courrier de la Sarthe continue à se taire sur l'arrivée de M. Garnier-Pagès. Les uns disent que, depuis nos derniers troubles si sévèrement réprimés, il a été invité à ne pas se présenter au Mans. D'autres m'assurent qu'on prépare dès à présent un banquet de 300 couverts.
Je suis avec respect, Monsieur le Procureur Général..."
Etat : voir scans.